C’est une visite express mais productive. De passage au Qatar avec, au menu, un agenda diplomatique chargé, Emmanuel Macron a signé une batterie de contrats représentant, selon le président de la République, un total de « près de 12 milliards d’euros » – un montant bien moindre en réalité, puisqu’il agrège commandes fermes et lettres d’intention. La cérémonie de signature d’accords commerciaux est un exercice récurrent de ce genre de visites. Mais elle prend d’autant plus d’importance au moment où le Qatar, en crise ouverte avec l’Arabie saoudite et dans un Moyen-Orient sous tension, cherche à cimenter ses alliances.
Macron signe une rafale de contrats au Qatar
Ces contrats « traduisent l’intensité de nos relations », s’est félicité Emmanuel Macron aux côtés de l’émir du Qatar, cheikh Tamim ben Hamad al-Thani, Bapteme et vol en avion de chasse avec qui il s’est aussi engagé pour coopérer dans la lutte contre le terrorisme. Tour d’horizon de la moisson récoltée ce jeudi.
Industrie de défense, maintenance du métro de Doha, dépollution des sols : nous avons signé des contrats de 12 milliards d’euros traduisant l’intensité de nos relations. pic.twitter.com/eTkCoFukRO
Contrats (et alliances) militaires
Certains des accords dévoilés étaient attendus, comme la vente de 12 avions Rafale à Dassault Aviation, qui constitue la levée d’une option intégrée dans le contrat d’achat de 24 Rafale signé en mai 2015. Ce contrat, estimé à 1,1 milliard par l’Elysée, s’inscrit dans un mouvement d’équipement tous azimuts de l’émirat pour constituer une véritable armée de l’air. Le Qatar opère actuellement 12 Mirage 2000-5.
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Les 36 Rafale lui seront livrés à partir de 2019 et l’émirat aurait même évoqué, selon l’Elysée, une option pour 36 appareils supplémentaires. Aux abois, l’émirat, qui subit le blocus aérien de ses voisins, a commandé cet été à Washington 36 F-15 de Boeing et a promis cet automne à Londres d’acquérir 24 Eurofighter. Comment tout cela s’harmonisera ? Peu importe, pour l’heure, Doha cherche des alliés.
Un bon signal pour Nexter
Moins attendu mais largement espéré ces dernières semaines, le Qatar a aussi signé une lettre d’intention pour l’acquisition de 490 véhicules blindés de type VBCI, des blindés à 8 roues motrices conçus et construits par Nexter, Renault Trucks Defense fournissant le châssis. Une aubaine pour l’entreprise publique, dont le carnet de commandes à l’exportation s’étiolait. Le VBCI de Nexter était en concurrence avec l’AMV du finlandais Patria, mais le Qatar a, là aussi, préféré s’assurer de l’appui de la France, un allié qui a plus de poids au conseil de sécurité de l’ONU que la Finlande…
Nexter se félicite d’avoir été choisi mais devra encore transformer cette intention en contrat. Les discussions sur l’équipement des VBCI et ses diverses variantes vont démarrer. Pour remporter la compétition, Nexter a proposé une option pour équiper les VBCI d’un canon de 40 mm produit avec BAE Systems, au lieu du canon de 25 mm dont sont équipés les VBCI français. Pour le constructeur public, l’enjeu de ce contrat, dont le montant pourrait évoluer autour de 2 milliards d’euros, est important, car c’est le premier succès à l’exportation du VBCI. Un bon signe pour la prochaine compétition en vue, qui doit se dérouler au Royaume-Uni.
Au Qatar, 12 Rafale, 490 VBCI, des coopérations fructueuses à venir : la récompense d’années de travail et une reconnaissance pour l’excellence de notre industrie d’armement.
Fière de participer aux côtés de @EmmanuelMacron à ce nouveau succès de la France.
L’exigeant client d’Airbus
Au rayon des signatures annoncées ce jeudi figure aussi une commande de 50 Airbus A321 neo pour Qatar Airways, d’une valeur annoncée par l’Elysée de 5,5 milliards. Toutefois, ce contrat est en fait la conversion d’une précédente commande de 50 A320 neo passée par Qatar Airways. Mécontent des problèmes techniques rencontrés sur les moteurs Pratt & Whitney de ses A320 Neo, le directeur général de la compagnie, Akbar Al Baker, avait d’abord annulé la livraison des quatre premiers exemplaires, avant d’annoncer son intention de remplacer sa commande d’A320 neo pour des A321 neo, de plus grande taille et dotés de moteurs CFM.
Cette conversion ne va donc pas changer grand-chose sur le carnet de commandes d’Airbus, qui récupère seulement les quatre appareils annulés. En revanche, c’est une belle victoire en perspective pour CFM, la coentreprise de GE et Safran, pour peu que Qatar Airways confirme le changement de motoriste. La compagnie, qui compte déjà 107 Airbus dans sa flotte et en a encore 116 en commandes, en dira peut-être plus lors de la livraison du premier A350-1000, qui devrait intervenir avant la fin de l’année.
Métro et tramway pour SNCF-RATP
Pour RATP Dev (la filiale de la RATP pour les activités hors Ile-de-France) et Keolis (le groupe de transport public contrôlé à 70 % par la SNCF), le suspense était éventé depuis quelque temps.
Ils ont donc annoncé, sans surprise, avoir remporté, via leur consortium RKH Qitarat, le contrat d’exploitation et de maintenance du métro de Doha, ainsi que du tramway de Lusail, une ville en train de sortir de terre au nord de la capitale qatarie. « Ce contrat emblématique, d’une durée de vingt ans, est estimé à plus de 3 milliards d’euros, précisent les deux groupes dans un communiqué. Le réseau devrait être lancé dès la fin de l’année 2018, par étapes, jusqu’à l’achèvement des travaux en 2020. »
Suez aussi de la partie
Le futur métro de Doha, avec ses trois lignes totalisant 75 km et ses 37 stations desservies, devrait accueillir 640.000 voyageurs par jour à horizon 2021. Il sera entièrement automatique et sans conducteur. Le tramway de Lusail, quant à lui, à 50 % souterrain, « s’étendra sur 18 km et sera constitué de quatre lignes desservant 25 stations au total ». Ces deux infrastructures permettront notamment de transporter les visiteurs lors de la Coupe du monde de football 2022, organisée au Qatar et dont les matchs d’ouverture et de clôture se dérouleront à Lusail, dans un stade flambant neuf de 80.000 places.
Enfin, l’émirat a aussi signé avec le groupe Suez pour la dépollution des lagunes d’Al Karaana, au sud-ouest de Doha. « D’un montant de 107 millions d’euros, ce contrat prévoit la réhabilitation de 400 hectares de lagons », a précisé le groupe dans un communiqué.
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